Accueilli plutôt fraîchement au dernier festival du film fantastique de Gérardmer par une meute de "fans" probablement trop cartésiens et désireux de retrouver à tout prix la flamboyance de la fin des années 70,le dernier long métrage de Dario Argento s'éloigne courageusement des univers oniriques et opératiques délimités par SUSPIRIA et INFERNO pour proposer une relecture ironique et moderne de la saga initiée en 1977 par le célèbre cinéaste italien.
LA TERZA MADRE se présente comme une fête à la sauvagerie primitive et aux accents païens,où le réalisateur convoque avec une nostalgie quelque peu désabusée toute une imagerie d'une cinéma disparu: le Fantastique italien des années 60 à 80.
Argento rend ici hommage aux artisans qui ont fait le cinéma de genre de son pays,de Sergio Martino à Lucio Fulci (le meurtre "trippant" de Coralina Cataldi Tassoni,les larmes de sang du policier,les suppliciés du final...) en passant par Mario Caiano (les enchainés des AMANTS D'OUTRE TOMBE),Ruggero Deodato (la mort de Valeria Cavalli) et bien évidemment par le "mentor" d'Argento,Mario Bava,cité en ouverture (la goutte de sang du MASQUE DU DEMON qui provoque le réveil de Mater Lachrymarum,les mains sculptées et la fameuse apparition sursaut de SHOCK -ici le démon satyre du SYNDROME DE STENDHAL qui harcèle encore Asia Argento- ) et en conclusion de récit (le couple dans les barbelés de LA RUEE DES VIKINGS,la Villa Graps d'OPERATION PEUR et enfin la Rome étrangement factice du dernier plan, image simulacre,à l'instar des faux cheval et paysage de la fin des 3 VISAGES DE LA PEUR).
Plus généralement,Argento fait de LA TERZA MADRE une déclaration d'amour à l'Art sous toutes ses formes, du cinéma à la littérature (la maison de Philippe Leroy et son émouvante exhumation du livre des 3 Mères,les recherches d'Asia Argento dans la bibliothèque,une scène clé du film se déroulant même dans une librairie -où Argento retrouve les travellings furtifs de l'ouverture de TENEBRES avec Ania Pieroni-...),en passant par la peinture:
Le cadre du film est ainsi constamment chargé de tableaux,de fresques d'apocalypse,des génériques très stylisés (où le cinéaste nous dévoile les influences visuelles du métrage) aux références picturales à Bosch,Goya,à l'art graphique (l'inattendu "fumetti" en flash back qui casse la narration filmique et dont les illustrations sonores renvoient directement aux peintures "vivantes" du SYNDROME DE STENDHAL).
Même si Argento paie ici son tribut aux artistes qui ont su l'inspirer tout au long de sa carrière, LA TERZA MADRE n'est pourtant pas qu'une oeuvre nostalgique et référentielle et le cinéaste ancre cette fois-ci les poussées du surnaturel dans notre quotidien le plus banal,à l'inverse des univers désincarnés,irréalistes et hermétiques de SUSPIRIA et INFERNO.
Argento quitte désormais ses palaces rutilants et leurs univers clos pour ouvrir son récit et faire de la ville de Rome un gigantesque terrain de chaos et de désolation,le cinéaste fantasmant ainsi une métaphore contemporaine de la décadence de nos sociétés dites "civilisées":
La "seconde chute de Rome",c'est en effet cette violence quotidienne et aveugle qui éclate sans prévenir et de façon irraisonnée dans les rues,les mères tuant leurs enfants,la loi et la religion étant désormais des institutions morales dépassées et bafouées (voir à ce titre la mort délicieusement interminable du prêtre incarné par Udo Kier,massacré par sa servante).
Argento s'éloignant toujours plus des deux précédents opus de la trilogie personnifie cette fois-ci les sorcières,en en faisant non sans humour des créatures gothiques,délurées et anarchiques,des trublions punk prenant plaisir à insulter les badauds de Rome et à s'adonner à des rites décadents (cannibalisme,perversions sexuelles,orgies...).
Le cinéaste,désinhibé par l'expérience américaine heureuse des MASTERS OF HORROR,semble jubiler de ces excès de sauvagerie retrouvée et surenchérit dans la veine décomplexée de JENIFER et PELTS,Argento mêlant toujours le sexe à la violence et n'épargnant pas les innocents pour notre plus grand plaisir sadique:
Un couple sympathique de lesbiennes subit ainsi un sort particulièrement atroce,une mère se débarrasse nonchalamment de son nouveau-né avant de prendre conscience de la gravité de son geste insensé et d'éclater en sanglots dans un beau montage en crescendo musical,les sorcières se régalent du cadavre du fils de Michael Pierce et la Mater elle-même (Moran Atias,dont le physique sculptural est "léché" judicieusement,petit à petit,par la caméra voyeuse d'Argento...) est un top model préfabriqué qui périt sous le poids écrasant d'un symbole phallique démesuré!
Même si Argento n'évite pas certaines maladresses dues principalement à un budget qu'on devine un peu trop étriqué par rapport à la délirante ambition du projet (des effets numériques très moyens et voyants -mais non sans un certain charme désuet-,le personnage discutable de Daria Nicolodi,la prestation énergique mais un peu inégale d'Asia Argento,une fin trop précipitée même si en accord en cela avec la conclusion de SUSPIRIA...), LA TERZA MADRE se révèle être un film somme pour le Fantastique transalpin et avant toute chose une oeuvre profondément libre et audacieuse,en regard d'un cinéma de genre actuel de plus en plus timoré et formaté.
Une oeuvre discrètement autobiographique aussi,Asia et sa mère Daria Nicolodi nous rejouant à l'écran la séparation de la famille Argento...
LA TERZA MADRE se présente comme une fête à la sauvagerie primitive et aux accents païens,où le réalisateur convoque avec une nostalgie quelque peu désabusée toute une imagerie d'une cinéma disparu: le Fantastique italien des années 60 à 80.
Argento rend ici hommage aux artisans qui ont fait le cinéma de genre de son pays,de Sergio Martino à Lucio Fulci (le meurtre "trippant" de Coralina Cataldi Tassoni,les larmes de sang du policier,les suppliciés du final...) en passant par Mario Caiano (les enchainés des AMANTS D'OUTRE TOMBE),Ruggero Deodato (la mort de Valeria Cavalli) et bien évidemment par le "mentor" d'Argento,Mario Bava,cité en ouverture (la goutte de sang du MASQUE DU DEMON qui provoque le réveil de Mater Lachrymarum,les mains sculptées et la fameuse apparition sursaut de SHOCK -ici le démon satyre du SYNDROME DE STENDHAL qui harcèle encore Asia Argento- ) et en conclusion de récit (le couple dans les barbelés de LA RUEE DES VIKINGS,la Villa Graps d'OPERATION PEUR et enfin la Rome étrangement factice du dernier plan, image simulacre,à l'instar des faux cheval et paysage de la fin des 3 VISAGES DE LA PEUR).
Plus généralement,Argento fait de LA TERZA MADRE une déclaration d'amour à l'Art sous toutes ses formes, du cinéma à la littérature (la maison de Philippe Leroy et son émouvante exhumation du livre des 3 Mères,les recherches d'Asia Argento dans la bibliothèque,une scène clé du film se déroulant même dans une librairie -où Argento retrouve les travellings furtifs de l'ouverture de TENEBRES avec Ania Pieroni-...),en passant par la peinture:
Le cadre du film est ainsi constamment chargé de tableaux,de fresques d'apocalypse,des génériques très stylisés (où le cinéaste nous dévoile les influences visuelles du métrage) aux références picturales à Bosch,Goya,à l'art graphique (l'inattendu "fumetti" en flash back qui casse la narration filmique et dont les illustrations sonores renvoient directement aux peintures "vivantes" du SYNDROME DE STENDHAL).
Même si Argento paie ici son tribut aux artistes qui ont su l'inspirer tout au long de sa carrière, LA TERZA MADRE n'est pourtant pas qu'une oeuvre nostalgique et référentielle et le cinéaste ancre cette fois-ci les poussées du surnaturel dans notre quotidien le plus banal,à l'inverse des univers désincarnés,irréalistes et hermétiques de SUSPIRIA et INFERNO.
Argento quitte désormais ses palaces rutilants et leurs univers clos pour ouvrir son récit et faire de la ville de Rome un gigantesque terrain de chaos et de désolation,le cinéaste fantasmant ainsi une métaphore contemporaine de la décadence de nos sociétés dites "civilisées":
La "seconde chute de Rome",c'est en effet cette violence quotidienne et aveugle qui éclate sans prévenir et de façon irraisonnée dans les rues,les mères tuant leurs enfants,la loi et la religion étant désormais des institutions morales dépassées et bafouées (voir à ce titre la mort délicieusement interminable du prêtre incarné par Udo Kier,massacré par sa servante).
Argento s'éloignant toujours plus des deux précédents opus de la trilogie personnifie cette fois-ci les sorcières,en en faisant non sans humour des créatures gothiques,délurées et anarchiques,des trublions punk prenant plaisir à insulter les badauds de Rome et à s'adonner à des rites décadents (cannibalisme,perversions sexuelles,orgies...).
Le cinéaste,désinhibé par l'expérience américaine heureuse des MASTERS OF HORROR,semble jubiler de ces excès de sauvagerie retrouvée et surenchérit dans la veine décomplexée de JENIFER et PELTS,Argento mêlant toujours le sexe à la violence et n'épargnant pas les innocents pour notre plus grand plaisir sadique:
Un couple sympathique de lesbiennes subit ainsi un sort particulièrement atroce,une mère se débarrasse nonchalamment de son nouveau-né avant de prendre conscience de la gravité de son geste insensé et d'éclater en sanglots dans un beau montage en crescendo musical,les sorcières se régalent du cadavre du fils de Michael Pierce et la Mater elle-même (Moran Atias,dont le physique sculptural est "léché" judicieusement,petit à petit,par la caméra voyeuse d'Argento...) est un top model préfabriqué qui périt sous le poids écrasant d'un symbole phallique démesuré!
Même si Argento n'évite pas certaines maladresses dues principalement à un budget qu'on devine un peu trop étriqué par rapport à la délirante ambition du projet (des effets numériques très moyens et voyants -mais non sans un certain charme désuet-,le personnage discutable de Daria Nicolodi,la prestation énergique mais un peu inégale d'Asia Argento,une fin trop précipitée même si en accord en cela avec la conclusion de SUSPIRIA...), LA TERZA MADRE se révèle être un film somme pour le Fantastique transalpin et avant toute chose une oeuvre profondément libre et audacieuse,en regard d'un cinéma de genre actuel de plus en plus timoré et formaté.
Une oeuvre discrètement autobiographique aussi,Asia et sa mère Daria Nicolodi nous rejouant à l'écran la séparation de la famille Argento...
2 commentaires:
ce qu'il y a de sur, c'est que l'on a pas du voir le même film. Pour ma part Argento est fini, rayé de la carte avec cet étron cinématographique filmé comme un épisode de Navarro, sans rythme, mal joué, en panne d'inventivité.
Du pur foutage de gueule pour des fans ( dont je fais partis ) qui attendent cette suite depuis 25 ans !!
Une série B filmé comme une Z ( la fin est particuliérement horrible...on dirait du Z allemand...en pire !! )avec des sorciéres drag-queens refaites de la poitrine, Asia Argento qui joue comme un sac.
Honteux et affligeant, je ne vois pas d'autres mots.
Sans rancune mon canard.
J'ajoute ton blog dans mes liens.
Le coup de Argento = Navarro n'est pas nouveau.
La Terza Madre a peut être des défauts (comme Inferno, Profondo Rosso...) mais n'est pas la bouse annoncée. Je suis content de voir un cinéaste qui cherche à se renouveler à chaque film. Il n'essaie pas de faire machine arrière en tentant de mettre de la couleur à tout va dans son film. Après, on aime ou on n'aime pas. Pour moi, le Syndrome de Stendhal vaut largement 4 mouches de velour Gris et Non Ho Sonno n'a pas à rougir fasse au Chat à Neuf Queues par exemple. Le final raté d'Inferno, personne n'en parle. Depuis quand Inferno est un film méga rythmé? La Terza Madre est à Infero et Suspiria ce que Non Ho Sonno est à ses gialli. Un renouvellement de son cinéma de l'intérieur.
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